CINEMA
Habemus Papam
de Nanni Moretti
[Drame]
Sortie le 7 Septembre 2011Après la mort du Pape, le Conclave se réunit afin d'élire son successeur. Plusieurs votes sont nécessaires avant que ne s'élève la fumée blanche. Enfin, un cardinal est élu ! Mais les fidèles massés sur la place Saint-Pierre attendent en [...]

HABEMUS PAPAM
Pour ou contre ?
Par Olivier De Bruyn et François Aubel
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La crise du pape Picccoli est-elle une subtile satire de la comédie du pouvoir ou une farce décevante ? Présenté en compétition à Cannes, le dernier film de Nanni Moretti divise la rédaction d'Evene.
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Olivier De Bruyn
Cinq ans après voir réglé son compte à Berlusconi dans 'Le Caïman', le peu prolixe Nanni Moretti revient avec 'Habemus Papam', un film dont le projet peut se résumer ainsi : s'amuser avec le Vatican et un pape de fiction. Ce qui, sur le papier, est déjà synonyme de bonne nouvelle. Et sur l'écran ? Sur l'écran aussi, même si le film - tant pis pour ceux qui communient sur l'autel du pamphlet - n'a rien de la charge à la dynamite contre l'Eglise Catholique.
Intimiste et surprenant, Moretti met en scène la crise de foi de son personnage principal : le cardinal Melville, nommé pape par ses pairs en soutane. Face aux responsabilités à venir, Melville (Michel Piccoli, épatant) sombre en dépression, est contraint de consulter un psychanalyste également mal-en-point (Moretti himself), puis prend la poudre d'escampette dans les rues de Rome. Comment être à la hauteur de soi-même ? Comment résister à la pression quand on est élu chef ? Avec son humour singulier, le cinéaste montre à quel point, c'est le cas de le dire, l'habit ne fait pas le moine. Et la situation vécue par le pape en crise, incapable d'épouser son destin, l'est aussi par les autres personnages du film : les responsables de la 'com'' catholique, qui ne savent plus à quel saint se vouer pour calmer la foule pieuse rassemblée Place Saint-Pierre, le psy incapable d'allonger son souverain patient sur le divan et qui, du coup, organise des parties de Volley-ball avec les cardinaux.
'Habemus Papam', drôle et mélancolique, médite avec légèreté sur les troubles de l'identité, les difficultés à ressembler à soi-même. En passant, le cinéaste se moque de tous les rituels (ceux du Vatican comme ceux de la psychanalyse) et égratigne la comédie du pouvoir. Le résultat, subtil et paradoxal, rappelle qu'il n'est pas utile de se prendre au sérieux pour raconter des choses sérieuses. Ni nécessaire d'adopter un ton solennel pour être profond. Et si 'Habemus Papam' n'est pas le meilleur film de son auteur (on peut lui préférer la poignante 'Chambre du fils' ou le très personnel 'Journal intime'), le moins que l'on puisse dire est qu'il fait joliment tache dans l'ordinaire cinématographique. Un Moretti, même petit, vaut bien une messe. Amen.

François Aubel
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L'idée du scénario était superbe : à la mort du pape, le conclave se réunit pour élire (à la majorité des deux tiers des cardinaux votants) le nouveau souverain pontife. Mais malheur à l'élu de Dieu, aucun des candidats potentiels ne veut s'asseoir dans le Saint-Siège. Au grand soulagement de la chrétienté, ce sera Melville, interprété par sa sainteté Piccoli. Sauf qu'au moment de se présenter à la foule, le nouveau pontife est saisi d'effroi. Il pousse un cri terrible, comme d'un condamné avant l'échafaud. Mises à part quelques farces, comme celle du cardinal qui se prend les pieds dans sa soutane, la présentation de ce " double-pape" (dixit Moretti), partagé entre l'angoisse et le bonheur de croire, est parfaite. Et puis, la messe est finie. Au chevet du souverain pontife arrive un psychanalyste, Nanni Moretti en personne qui fait du... Nanni Moretti. On a beau aimer habituellement son cabotinage, ses sorties anti-cléricales ou politiques, sa chasse aux utopies, le scénario qu'il a écrit avec Feredrica Pontremoli et Francesco (comme pour 'Le Caïman', son précédent long-métrage) ne tient pas. Le pape finit par s'échapper du Vatican pour échouer, on se demande bien par quel miracle, aux côtés d'acteurs jouant 'La Mouette' de Tchekhov. Dans une symétrie ne fonctionnant jamais, le psy organise le temps libre des Cardinaux : jeux de cartes, tournoi de volley... Pour prendre à revers son public, Moretti a pris le parti de ne pas entrer dans la dénonciation des scandales pontificaux, pédophilie et autres dérives financières. En athée revendiqué, il n'a pas souhaité non plus s'engager plus avant sur le chemin de la foi. Il a choisi un itinéraire sur lequel erre le pape Piccoli, tous feux éteints.
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